on la vit au bout
d'une heure arriver dans un chariot tout de feu, traîné par des
dragons. Le Roi lui alla présenter la main à la descente du
chariot. Elle approuva tout ce qu'il avait fait ; mais comme elle
était grandement prévoyante, elle pensa que quand la Princesse viendrait
à se réveiller elle serait bien embarrassée toute seule
dans ce vieux Château : voici ce qu'elle fit.
Elle toucha de sa
baguette tout ce qui était dans ce Château (hors le Roi et la Reine),
Gouvernantes, Filles d'Honneur, Femmes de Chambre,
Gentilshommes, Officiers, Maîtres d'Hôtel, Cuisiniers, Marmitons,
Galopins, Gardes, Suisses, Pages, Valets de pied ; elle toucha aussi
tous les chevaux qui étaient dans les Écuries, avec les
Palefreniers, les gros mâtins de basse-cour et la petite Pouffe,
petite chienne de la Princesse, qui était auprès d'elle sur son lit.
Ces défenses
n'étaient pas nécessaires, car il crût dans un quart d'heure tout autour
du parc une si grande quantité de grands arbres et de
petits, de ronces et d'épines entrelacées les unes dans les autres,
que bête ni homme n'y aurait pu passer: en sorte qu'on ne voyait plus
que le haut des Tours du Château, encore n'était-ce que
de bien loin. On ne douta point que la Fée n'eût encore fait là un
tour de son métier afin que la Princesse, pendant qu'elle dormirait,
n'eût rien à craindre des Curieux.